Je veux comme un enfant sauvage
Courir dans les tristes palais
Où mon cœur contemple en image
Mademoiselle de Galais,
La belle dame qui promène
En de nostalgiques domaines
L’âme d’un monarque exilé.
Je veux, couronné de cerises,
M’habiller en prince chinois,
Je veux régner sur des banquises
Qui porteraient des noms danois.
Mon cœur qui vole et qui frivole
Attrape les poissons qui volent
Sur la route de Mandalay
Alexandre Vialatte
La Paix des jardins, d’Alexandre Vialatte Le Dilettante, 112 p., 15 €.
Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :
Consignés au début des années 1920 dans les cahiers d’écolier qu’Alexandre Vialatte (1901-1971) utilisait alors, les poèmes du journaliste et traducteur ont été retrouvés par ses proches, à l’état de manuscrit ou de tapuscrit. Dans ceux publiés ici par Le Dilettante, Vialatte y apparaît comme un tout jeune poète, alignant les vers pour y dire des histoires d’écoliers, des rêves de jeunesse ou des émois adolescents avec pudeur. Parfois s’insèrent quelques lignes badines, comme celles contant l’histoire de ce « poète / Qui s’embête / Cherche les occupations / La devise, la toilette, / La couleur de la saison ».
Le charme de ces poèmes, un peu surannés, va de pair avec une mélancolie certaine. À la toute fin du recueil, quelques textes, écrits dans les années 1950, laissent à voir des poèmes plus graves, ceux d’un homme marqué par les procès qu’il couvre en tant que chroniqueur judiciaire.
Loup Besmond de Senneville
(Initialement paru dans La Croix l’hebdo n°8)