UPPLR #239 : Pour Miles, par Gregory Corso

Ton son est irréprochable
pur et rond
sacré
presque profond

Ton son est ton son
vrai & de l’intérieur
d’une confession
plein d’âme et de charme

Poète dont le son est joué
perdu ou enregistré
mais entendu
peux-tu te rappeler cette nuit de 54 à l’Open Door
quand toi & Bird
avez pleuré à cinq heures du matin une merveilleuse
et pourtant inimaginable partition ?

Gregory Corso
Extrait de Gasoline, City Lights, 1958.

Traduite de l’anglais (États-Unis) par Tom Buron, publié dans Le Nom du son, une anthologie jazz et poésie dirigée par Franck Médioni et Tom Buron. Le Castor astral, 212 p., 20 €

Le 21 novembre 1954, Miles Davis et Charlie Parker, surnommé « The Bird », donnent un concert à l’Open Door, célèbre club situé dans le quartier de Greenwich Village à New York. Les deux géants du jazz y mêlent leurs harmonies, entre be-bop et cool. Le concert inspire à Gregory Corso, poète américain de la beat génération (1930-2001), cet hommage à Miles, qui a commencé sa carrière avec Parker. C’est l’un des 106 textes que propose une ambitieuse anthologie reliant jazz et poésie, donnant à lire ce que des poètes et poétesses venus du monde entier, nés entre la fin du XIXe siècle et le début du XXIe, ont écrit à l’écoute des standards de cette musique toujours neuve. E. E. Cummings, Léopold Sédar Senghor, CharlÉlie Couture ou Allen Ginsberg mêlent ainsi leurs rimes pour un jam endiablé dirigé par le poète Tom Buron et le journaliste Franck Médioni, spécialiste du genre. Le tout s’achève, en guise d’outro, sur les mots de Jacques Réda célébrant « tous les aspects de la vie qui est Rythme et par conséquent accès à la véritable liberté ». Il suffit de laisser la musique jouer.

Stéphane Bataillon
(Initialement paru dans La Croix l’hebdo n°239 du 29 juin 2024)