le temps change d’arme
le vent n’a plus la force
il pleut comme en enfance
pluie diras-tu
par où t’aimer ?
on ne sait rien
jusqu’au moment où l’on se voit
soi-même sous la pluie
Étienne Paulin
Poèmes pour enfants seuls, Gallimard, 152 p., 17,50 €.
Lorsque l’on est enfant, on aime jouer tout seul à s’inventer un monde. À chercher des trésors, à observer les chats, à explorer les prés comme un royaume magique dont le puits, en fonction, figurerait la porte. Qu’en reste-t-il, une fois grandi ? Des bribes et des images qui, une fois remontées dans un ordre anarchique, constitueront peut-être la trame d’un poème contre les jours de pluie. L’occasion d’un échange entre nos souvenirs : « plusieurs chats se rassemblent / pour parler d’un regret / leurs moustaches s’effleurent / on voit qu’ils s’aiment bien / ils repartent guéris ». Dans son dernier recueil, Étienne Paulin égraine scènes et impressions presque intemporelles, comme une « boîte à trésors » commune à nos enfances, avec la nostalgie en guise de parfum. « Lorsque je les vois /les arbres me manquent. » Un jeu pour patienter jusqu’au moment où vient le temps de la rencontre. Celle de sa compagne Ariel Spiegler, elle-même poète et sujet de sa dernière partie, qui surgit telle une princesse de contes dans l’existence : « Ariel est là depuis toujours / dans un repli de mon vrai cœur d’enfant. »
Pour un nouveau royaume.
Stéphane Bataillon
(Initialement paru dans La Croix n°210 du 1er décembre 2023)