Tu te dois d’être bref
Pour dire la racine au présent,
Éprouver le poids sacré
De la pierre,
Épouser l’île au loin
et ses falaises blanches,
Te faufiler dans le sable du chemin
Avec le lézard,
Guetter dans les ronces
Le fruit du mûrier,
Écarter tout mur
Entre le réel et toi,
Marcher d’un pas tranquille
Sur les traces du royaume,
Écouter en toi
Battre le cœur du monde.
Jean Lavoué
Écrits de l’arbre dans le soleil, L’enfance des arbres, 130 p., 15 €.
Un poème comme un souffle, qui traverse et dépasse celui qui tient la plume. Depuis de nombreuses années et plus d’une quarantaine d’ouvrages, Jean Lavoué use de cette parole pour témoigner d’une foi. À l’instar de Gilles Baudry, Gérard Bocholier ou Colette Nys-Mazure, il puise ses résonances dans la tradition chrétienne mêlée de l’expérience des jours, faite d’ombres et d’émerveillements au fur et à mesure de l’avancée des corps. Ces écrits de l’arbre, apparemment limpides, demandent à être lentement relus, presque médités, pour se teinter de nous, libérer leurs saveurs. Comme la senteur des feuilles après une pluie d’été, ils ramènent à cet essentiel qui n’attend qu’une pause et qu’un silence de nous pour remonter des sources.
Stéphane Bataillon
(Initialement paru dans La Croix l’hebdo n°190)