Le ciel, ce matin, n’attend pas de révélation
il attend de toi une foi sans professeur
il attend de toi une foi sans excuses
regarde, les nuages sont dorénavant
des bulles de bandes dessinées
qui te font dire ce que tu veux
pour une fois, laisse-les sans paroles,
laisse-les croire
tu serais surprise
va, tes pensées se gonflent
d’amnésie
écoute leur bruit blanc
comme ces chewing-gums
qui claquaient
hors de nos bouches
fais vibrer le langage sur cette partition
d’aube
au goût malabar pêche
Florence Valéro
Des statues dans l’orage, L’Arbre à paroles, 92 p., 12 €
Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :
Le livre s’ouvre sur un extrait de L’Art de perdre, d’Alice Zeniter. Il a commencé à s’écrire à Kiev, en 2018, et s’est achevé à l’heure des premières bombes russes sur l’Ukraine. Comment ce basculement résonne-t-il avec les troubles et les brisures de notre vie intime ? Comment nous concerne-t-il au plus profond ? Des statues dans l’orage, nouveau recueil de la poète et dramaturge Florence Valéro, tente une réponse : dans ces moments de sidération, notre seule puissance d’agir est bien souvent d’ouvrir le regard pour saisir ce qui peut l’être, récolter des souvenirs pour les jours prochains. Des détails hier insignifiants que l’on emporte avec soi, comme ces moineaux que l’on regarde « sautiller et se perdre dans l’air ». Il faut, pour cela, réapprendre à observer « D’une patience / de celle requise / quand on traque /un météore ».
Ces vers, d’une écriture à la fois tenue et remplie d’images fortes, ont un poids qui leste la vie. Qui pourrait être utile pour survivre à nos peurs. « J’attends d’une étoile/qu’elle crève les ombres ». Pour mieux laisser s’échapper cette voix d’enfance que rien ne couvrira : « si comme on dit / les yeux sont des fenêtres // où est la porte ? »