Apprendre du regard
contempler la lumière —
demeurer
inaltérable, comme un phare
qui maintient toujours vivant
le feu intérieur.
Avoir conscience
de n’être que
l’instant d’une infinitude.
Savoir
sans savoir.
***
Aprendre de la mirada :
contemplar la llum —
romandre
inalterable, com un far
que sempre manté viu
el foc interior.
Tenir consciència
de ser tan sols
l’instant d’una infinitud.
Saber
sense saber.
Antoni Clapés
Et le soleil dans ta main. Traduit du catalan par Mireille Gansel et Dolors Udina, La Coopérative, 128 p., 16 €
Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :
C’est une parole épurée. Débarrassée des images trop précises et ne laissant au jour que des éléments simples. Des fleurs, des oiseaux, des arbres. Crocus, pies et érables peuvent alors se mêler au brouillard de l’hiver,
à la lumière d’automne pour aller « vers une terre d’accueil / plus noble ». Celle du silence et de la sobriété qui manquent tant dans nos vies. Les vers du poète catalan Antoni Clapés, né en 1948, également traducteur et critique d’art, se déploient dans cette édition bilingue qui regroupe deux recueils, Pays d’hiver (2019) et Là où la lumière (2017). Écrits en parallèle de travaux de traduction, geste porté entre deux langues, ces poèmes disent toute la richesse de cet aller-retour entre lecture et écriture : « Faire avec les mains que l’esprit s’envole : / créer de la beauté / à l’intérieur, avec des mots nouveaux – / sans faire exprès. »
Stéphane Bataillon
(Initialement paru dans La Croix l’hebdo du 9/09/2022)