J’attends le soir pour habiter
le ciel
Je sais monter
pousser les nuages avec ma hanche
celle sur laquelle tu poses la paume
de ta main
c’est aussi un nuage
J’attends devant la porte
comme j’attendais que ma mère
dise
Entre
pour venir dans sa chambre
Je m’assois et je regarde un peu en bas
la lueur des arbres et des océans
comme des petites mares bleues
Quand les lampes sont des croissants
dans les maisons
je suis là-haut même si j’ai perdu
mes ailes
Sandra Lillo
Les bonbons pleurent, Le Castor Astral, 128 p., 12 €
Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :
Remarquée par la poétesse Valérie Rouzeau qui signe la préface de son premier recueil d’importance, Sandra Lillo, née en 1973, raconte, sur les réseaux ou sur les pages, le fil d’une vie. Des HLM, l’épidémie, des vivants et des morts, des fins de mois, des précipitations. Mais le poème enchante. Sans effets de manches, elle relève ces détails quotidiens, ces paradoxes, ces étincelles de joie dans les jours mornes, éprouvés sans toujours les relever. La voix étrangère se fait amie, avec légèreté, précision et grâce. Elle pousse au dialogue avec l’inconnu autour d’un café, même lorsque « Tu crois aux racines/et moi je crois aux ailes » pour construire quelque chose, quelques mots autour desquels se retrouver. « On a fait le sapin//Il y a des petites poires lumineuses/entre les branches//ça réchauffe la maison//Je me dis//Le sapin, c’est la cheminée/des pauvres. » Mais surmontée d’une étoile nouvelle.
Stéphane Bataillon
(Initialement paru dans La Croix l’hebdo n°111 du 10/12/2021)