Un poème pour la route #268 : Au long d’un trottoir, par Pierre Dainhaut

Au long d’un trottoir comme au fil des dunes,
appuie-toi sur la vigilance, elle est ce vent
qui t’interdit de te raidir à la fin,
pourquoi y aurait-il une fin ? Que tu le veuilles
ou non, quelques mots se réintroduisent,
il te suffit de la voix basse
sans vouloir les interpréter : frémir
avec ce que permet l’haleine
propre à chacun de nous, le lieu ni l’âge
ne sont en cause, les enfants riaient en courant,
en associant monter, descendre,
le poème a pris le relais, tu te
perdras, tu t’orienteras.

Pierre Dhainaut
Et pourtant, Éd. Arfuyen, 144 p., 15 €

« Une voix est en nous sans être à nous : / dans la traversée des poèmes. » Après cinquante recueils qui l’ont installé comme l’une des voix les plus solides, bien que discrète, de la poésie contemporaine, Pierre Dhainaut offre avec Et pourtant une méditation solaire sur le passage du temps. Sur les gestes que nous devons modifier, moins amples, plus conscients, pour conserver la chaleur. Sur les mots que nous devons reconnaître, « syllabes légères » prenant un poids nouveau : écume, nuage, neige. Né en 1935 et vivant à Dunkerque où il poursuivit une carrière de professeur, le lauréat du prestigieux Prix Apollinaire en 2016 maintient cette ouverture vers l’autre, qu’il incarna en parlant et écrivant sur la poésie d’autres auteurs comme Octavio Paz ou Jean Malrieu. Un poème portant son éthique, pour conserver, quoi qu’il arrive, l’état d’enfance. « En chaque voix une autre, une autre appelle, / les enfants ne reculaient pas devant l’obstacle, / ils changeaient l’impasse en passage. »

Stéphane Bataillon
(Article initialement paru dans La Croix l’hebdo n°268 du 01/02/2025)

 

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