Si je dis que le désert est en moi
et que mon âme est nue
je n’ai rien dit.
Nous croyions que Dieu
allait nous secourir.
Nous croyions qu’il allait dominer le monde
et que nous devions combattre pour Lui
sur tous les fronts
et voilà qu’il n’est qu’un esclave
et qu’il nous dit de rentrer chez nous
fenêtres et portes closes.
Et voilà qu’il n’est qu’un enfant
et c’est Lui qui nous appelle au secours.
Quand on sait cela, Monsieur,
on meurt
ou on vit autrement.
Nicole Laurent-Catrice
À peine un souffle, Éd. La Part commune, 70 p., 11 €
Traverser, par quelques paroles simples, les mille pages du Livre. Y faire résonner ce qui nous touche le plus. D’une toute puissance à la plus grande fragilité, et du destin d’un peuple à la visée de notre vie. Avec À peine un souffle, Nicole Laurent-Catrice offre un recueil de poésie pour tenter de formuler, avec les mots d’aujourd’hui, les mystères de la foi. Elle cite Marc « Ils se demandaient entre eux ce que signifiait “ressuscité d’entre les morts”» (Marc 9, 10) et colle les images issues des testaments en y ajoutant juste la voix de la conteuse. Celle qui porte les espoirs d’une existence qui préserverait, encore un peu, la fraîcheur de nos états d’enfance : « Le même et pourtant un autre. / Et nous, nous voulions retenir le temps / monter la tente nous asseoir et manger. / Fraîcheur de la neige. Soleil blessant / énoncé par la voix. / Quels nuages opaques son corps a-t-il percés ? ». Poète, essayiste et traductrice née en 1937, à l’œuvre riche d’une vingtaine de recueils, Nicole Laurent-Catrice dit ici, avec des mots simples et forts, l’actualité de cet enfant dont on fête la naissance dans le soleil d’hiver : « À cause de cette fêlure / un jour / quelque chose passe. Est-ce pour nous quitter / ou nous rejoindre ? ».
Stéphane Bataillon
(Initialement parue dans La Croix l’hebdo n°263 du 20 décembre 2024)