Si tu peux garder ta tête
lorsque tous les autres autour de toi
perdant la leur te le reproche
Si tu peux garder confiance en toi
lorsque tous les autres en doutent
en tenant compte de leurs doutes
Si tu peux attendre sans être fatigué d’attendre
ou d’être trompé sans te mettre à mentir
ou d’être haï sans céder à la haine
sans paraitre trop beau
sans passer pour un sage
Si tu peux rêver sans que tes rêves soient tes maîtres
Si tu peux penser sans faire d’idées fixes
Si tu peux rencontrer et triomphe et désastre.
traitant ces imposteurs de la même façon
Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
gâchées par des valets pour mieux piéger les fous
Voir toutes les choses pour lesquelles tu avais donné ta vie
être soudain brisées
et t’abaisser à les reconstruire avec de vieux outils
Si tu peux faire un tas de tous tes gains et le risquer d’une mise
perdre, recommencer, et ne jamais souffler un seul mot de tes pertes
Si tu peux forcer ton cœur, tes nerfs et tes tendons
à prendre ton tour de garde
même si depuis longtemps les autres ont déserté
T’y tenir même lorsque tu te sens vidé
avec ce « Tiens bon ! » pour seule volonté
Si tu peux discuter avec toutes les foules en gardant ta vertu
marcher avec les Rois sans perdre le sens du peuple
Si ni tes ennemis ni tes meilleurs amis
ne peuvent te blesser
Si tous les hommes comptent pour toi
sans qu’ils soient tout pour toi
Si tu peux parcourir jusqu’à l’ultime minute
une distance utile
Tu seras et la Terre et tout ce qu’elle contient
Et -ce qui est bien plus- tu seras un Homme, mon fils !
Rudyard Kipling, 1885
(Traduction Stéphane Bataillon)
***
If…
If you can keep your head when all about you
Are losing theirs and blaming it on you,
If you can trust yourself when all men doubt you,
But make allowance for their doubting too;
If you can wait and not be tired by waiting,
Or being lied about, don’t deal in lies,
Or being hated, don’t give way to hating,
And yet don’t look too good, nor talk too wise:
If you can dream – and not make dreams your master;
If you can think – and not make thoughts your aim;
If you can meet with Triumph and Disaster
And treat those two impostors just the same;
If you can bear to hear the truth you’ve spoken
Twisted by knaves to make a trap for fools,
Or watch the things you gave your life to, broken,
And stoop and build ’em up with worn-out tools:
If you can make one heap of all your winnings
And risk it on one turn of pitch-and-toss,
And lose, and start again at your beginnings
And never breathe a word about your loss[es];
If you can force your heart and nerve and sinew
To serve your [or our] turn long after they are gone,
And so hold on [to it] when there is nothing in you
Except the Will which says to them: ‘Hold on!’
If you can talk with crowds and keep your virtue,
‘ Or walk with Kings – nor lose the common touch,
if neither foes nor loving friends can hurt you,
If all men count [on you,] with you, but none too much;
If you can fill the unforgiving minute
With sixty seconds’ worth of distance run,
Yours is the Earth and everything that’s in it,
And – which is more – you’ll be a Man, my son