Le poème est un principe cristallisateur, qui permet de transformer le réel perçu, le savoir arrivé au seuil de notre être, en connaissance. C’est à dire en information utile, car accueillie, permettant de vivifier notre puissance d’être.
Le processus du poème en train de s’inventer, de s’écrire, de se densifier par étapes de réduction, de nettoyage des scories, de densification, rejette, retient et assimile les éléments de ce savoir extérieur. Il les fait résonner avec nos éléments intimes déjà présents : souvenirs, bribes de paroles tournantes, énergies et émotions circulantes, afin d’obtenir un produit nouveau. Une matière nouvelle, vivante, qui procède d’une incarnation inversée prenant source dans le corps du poète, devenu passeur actif de ce réel premier.
Cette transmission, acceptée nous déleste : d’énergie, de mots, mais procure en retour de don, et par le fait même de son achèvement, un apport d’énergie nouvelle. Une dynamique qui est point d’étincelle. étincelle noire ou blanche selon ce qui en sort, rappelant le jeu des ténèbres et de la lumière et notre position qui, par cette énergie, nous fait passer de l’état de pion à celui de maître du jeu de notre humanité.
Comme le chant ou la prière, cet exercice du poème est un artisanat. Une maîtrise des lumières.
Plus que le point incandescent de la langue, le « faire poème » est l’une des réalisation de notre incandescence. Incandescence d’un feu qu’il nous faut entretenir pour qu’il tienne jusqu’à cette aube dont nous ne savons l’heure.