MANIFESTE DU PARTI NEUTRE
L’existence des ondes gravitationnelles vient juste d’être prouvée. Nous sommes au seuil d’un changement radical de notre perception de l’univers. Espace et temps confondus dans une onde, nous observons le ballet des protons et des neutrons donner libre cours à un autre idéal.
Il ne faudrait pas que le spectacle s’éternise et que nous tardions trop à entrer dans la danse. Car les conditions du désespoir sont aux portes de la salle.
L’ultra-libéralisme a englouti l’étincelle de nos vies dans une Doxa qui sent le gaz (de schiste). Ses meilleures soutiens : le mythe du tout-technique, dénoncé depuis longtemps par des penseurs comme Jacques Ellul, et une finance opérée par un trading à haute fréquence devenu incontrôlable qui vient se fracasser contre le mur de temps, (Paul Virilio lors d’une récente panne du système boursier).
Pendant ce temps, nous communiquons comme jamais. Mais que produisons nous ? Quel discours ? Quel contre-feux ? Quel projet possible ? L’abandon des politiques et de notre lien au politique constitue le ferment rêvé de toute les dictatures, rouges, brunes, ou bleues marine (Les partis extrêmes ne perdent jamais de temps pour imposer leur chef. Avance considérable.)
Alors créer autre chose. Prendre parti de manière plus dépouillée, moins bruyante, plus conviviale et plus joyeuse. Plus… plus… Neutre.
Nous prenons parti. Tendus vers le vivant, le simple et le calme dans un projet qui se souciera d’entamer au minimum les ressources qui nous sont offertes. Que trop souvent nous méprisons quand d’autres tentent de les breveter puisque qu’elles n’auraient pas de prix. Neutre pour la planète. Neutre également concernant l’accès aux nouvelles technologies (cette neutralité du net qui, ici, est synonyme de liberté.)
Nos finances ? L’argent est partout, explique tout, justifie toutes les destructions. Dieu plus jaloux qu’aucun autre, il doit revenir à sa fonction première : être un moyen et non une fin. C’est le grand défi de la party. Nos finances seront blanchies sous le harnais de nos contradictions. Nous prouverons par chaque ligne de nos comptes de campagne qu’une sobriété heureuse peut s’incarner dans une opulence frugale.
Notre force ? Toi, citoyen du monde libre sous surveillance qui trouveras ici le terrain vague où concentrer ton espoir. Toi qui désires encore choisir ta solitude car mieux vaut être seul que mal accompagné aux soirées de l’Ambassadeur.
Nos outils ? La sixième et septième fonction du langage. Outils performatifs surpuissants, plus précieux que la capitalisation boursière d’Alphabet, la maison-mère de Google. Ces deux usages de la langue, poétiques et magiques, définis par une palanquée de linguistes de Jakobson à Searle en passant par Austin, permettent d’utiliser les mots pour agir et transformer chacun. Un parti poétique performatif en somme.
Notre plan de bataille ? Nous naviguerons à vue et ne traquerons personne. Nicolas Bouvier de l’intime face à la big data, nous prendrons à bras le corps la question de l’usage du monde numérique. En cas de malheur, nos traces persistantes pourrait nous perdre tous. Mais elles peuvent également se changer en balises, témoins éclatants de nos petites victoires.
Le Parti Neutre sera iconoclaste. Trop d’images tue l’image. Nous sommes déjà à terre. Notre représentation n’aura d’autres visages que ceux qui surgiront du plus profond de vous.
Nos convictions ? Minimales mais intenses : Simplicité volontaire, souci du vivant, calme et non-violence des échanges (incluant donc le risque de devoir en découdre). L’économique, le social et le politique seront passés au crible de ces trois critères. Pour permettre à chacun de prendre la parole et d’investir les lieux.
Organisation liquide, le Parti Neutre met en place un dispositif ultra-léger pour atteindre 2017: un organe poétique mensuel, Gustave, disponible sur www.stephanebataillon.com et un compte Twitter @PartiNeutre où vous pourrez proposer toutes vos idées, et des kits militants à réaliser et à offrir en signe de ralliement. Une manipulation festive.
À bonne distance des polémiques quotidiennes saturant l’espace, nous ne savons pas où nous allons, mais nous savons très bien où nous ne voulons pas aller. Même si c’est « pour notre bien » et que, « mais enfin, vous n’y pensez pas, c’est la crise, ce n’est pas le moment » (et ce depuis 35 ans).
Nous serons un groupe de pression. Une class action de l’éternel instant. Un groupuscule anarchiste majoritaire au garde-à-vous de nos consciences, un roc soluble et insaisissable. Avec pour seul souci de s’ouvrir, de discuter, d’imaginer ensemble notre bien vivre commun (on dit buen vivir, de l’autre côté de l’Océan Atlantique).
Dans Albator 84, dessin animé de notre enfance, l’humanité, abrutie par les écrans, se laisse passivement envahir par des humanoïdes sans foi ni loi. Seul Albator, pirate de l’espace, se dresse pour défendre notre dignité. Nous sommes tous des Albators.
Les dévots du transhumanisme auront beau jeu de nous railler du haut de leur cynisme. Si nous sommes réactionnaires, c’est avant tout contre eux. Face à leurs desseins lucratifs et mortifères, nous opposons le Neutre, cette prise de recul face aux débats puérils faisant diversion et masquant les vrais enjeux et leurs vrais intérêts, ce possible infini qui nécessite si peu pour se sentir vivant.
Nous prenons le pouvoir. Maintenant, là, tout de suite. Le pouvoir d’exercer notre puissance. De se remettre à imaginer, agir, rire, créer, bref, résister pour lutter contre cette gigantesque entreprise d’affaiblissement de notre libre arbitre. Car, comme le disait récemment un adjudant dans un jeu de télé-réalité d’M6 : «Penser, réfléchir, c’est déjà désobéir.» Nous ne sommes pas contre l’ordre, l’argent ou le progrès. Nous sommes contre leurs mauvais usages qui nous mènent droit à la désespérance, au malheur et au néant de l’être.
Nous allons réduire. À feu doux.
Et y prendre plaisir.
Nous, #PartiNeutre,
9 mars 2016