Rencontre avec le typographe Jean-Baptiste Levée. Pourquoi passe t’il parfois plus de trois mois à créer minutieusement un nouvel alphabet et ses styles, infime décalage dans ce monde saturé de signes que peu remarqueront ? Pourquoi y met-il toute son énergie ? « Pour investir (son) humanité ». La phrase résonne avec le lent travail de disposition du poème, de la gestion d’un silence entre chaque mot qui est plus qu’un espace. Symphonie d’une seule note jouée à la mesure.
Si tout répond à un réel, part d’un problème à résoudre, d’une envie à assouvir, d’un besoin à combler, c’est bien de l’intérieur que vient l’énergie, la chaleur, la singularité (tout cela rassemblé sous le vocable de sincérité) nécessaire à la création d’une forme nouvelle. Qui pourra la charger d’une émotion particulière, reconnaissable d’un tremblement pour que le monde vibre différent.
C’est peut-être ce mouvement, la permanence de cet échange entre le dedans et le dehors qui ne dépend ni complètement de nous ni complètement des autres, qui est la condition indispensable de la création.