Rien à faire ici
Va téter le sein de ta mère !
Tu t’es trompé de porte
Argün ne dit rien
s’avance vers l’aubergiste
demande calmement une choppe de Tedj
Ne lui laisse pas le choix
Son regard noir compense la clarté
de la pièce d’un Shât dans le creux de sa main
Ont-ils vécu autant de pertes
au-delà de leurs cris
de leurs éructations ?
Connaissent-ils
les morsures de l’absence ?
Tous, ils se sont résignés
recroquevillés
à accepter leurs conditions
Promesse d’un avenir
meilleur et pacifié
d’un esclavage tranquille
Soudain, quelques notes
venue du fond de la pièce
et l’éclair d’un sourire
d’un elfe musicien
Argün, seul, semble les entendre
première gorgée
goût sucré
pour donner du courage
Il s’approche
évitant les coups de coudes
et les éclaboussures de bière
L’elfe
ne tient plus qu’une seule note
Ne semble jamais reprendre
sa respiration
Corps frêle, comme lui
mais quelque chose de plus
Comme lui
– Pourquoi joue-tu ?
Que me veux-tu ?
Et pourquoi moi ?
Bande originale du poème : Dragonforce – Cry Thunder
Note de création : Réel bonheur que de me lancer sur une histoire de fiction en tentant de concilier la forme du poème. Ce choix n’a rien d’artificiel, ni de commode. Il provient d’une frustration. Celle d’adorer l’ambiance de la fantasy, mais sans pouvoir toujours supporter la lourdeur des descriptions et des développements sans fins nécessaire pour entrer dans ces univers qui devraient être, paradoxalement, une réduction minimale de la puissance du merveilleux. Archétypes, valeurs fondamentales, élémentaires… Un outillage de poche, ancré dans l’inconscient, pour jouer avec nos émotions d’enfants, nos regrets d’adultes. Ou l’inverse. Je découvre aussi à cette occasion le monde du métal symphonique, notamment grâce au podcast de l’association Elbakin, Fantasy et Metal. Je vous ferai partager ces découvertes au fil des chapitres.