Je reviens dans ce lieu. Ce lieu de mon enfance. Nous sommes en décembre 1989, j’ai 13 ans. Je suis présent à l’inauguration du premier centre d’attraction parisien créé par l’une de mes idoles, Jean Chalopin, créateur des dessins animés que j’adore : Inspecteur Gadget, les mystérieuses cités d’or, Ulysse 31… Je suis un des premiers enfant à entrer ici. Les attractions ne marchent pas toutes, mais l’immensité des espaces et les fausses statues de mes héros préférés me fascinent. En quelques pas, je passe d’un temple Inca à un gigantesque simulateur spatial. L’accès aux attractions se réalise grâce à une carte en plastique donnée à l’entrée, chargée d’une monnaie -déjà- virtuelle les « Gadgets ». Avec les autres enfants présents, je joue les cobayes sous l’œil amusé des adultes. Un rêve éveillé. Le parc s’appelait la planète magique. J’ai toujours précieusement conservé la carte :
La planète magique ferma au bout de douze jours et fut l’un des plus beau fiasco du genre (une sorte de Centquatre puissance 10 000). Depuis le 2 mars, ce lieu a rouvert. Transformé en centre transdisciplinaire dédié aux cultures numériques, il a été rebaptisé de son nom originel : La Gaîté lyrique. Je le retrouve après 27 ans. L’espace est toujours aussi impressionnant. Des lumières et des sons, un bar posté dans une salle à l’italienne, de grands écrans plats sur lesquels défilent côte à côté les premiers jeux Nintendo et le dernier Tron en 3D. Une ambiance qui rappelle le film « Bienvenue à Gattaca », couleurs en plus. Je me balade. J’ai envie de prendre des photos. Je prends des photos. D’habitude, je ne prends jamais de photos.
La même impression. Le même émerveillement, la même excitation. Je me rends à une conférence avec Brian Eno. Il dit qu’il faut prendre le temps de formuler ce que l’on aime vraiment faire. Et le faire. Cette phrase, qui peut paraître ridicule, paraît, ici, juste. Je me dis que j’ai de la chance d’avoir trouvé la poésie. Une chance folle. Et je me mets à rêver. Je suis bien. Dans ce lieu, où tout a changé.