Depuis cinq ans, je travaille juste à côté du parc Montsouris. Je n’y suis jamais entré. Aujourd’hui, enfin, je retourne m’y balader. Car ce parc est mon parc, ce parc est notre parc.
Petit, mon père m’y emmenait chaque jour. Une exigence, un sacerdoce. Pas juste pour me faire prendre l’air. Pour connaitre l’adversaire qui deviendrait ami. Pour découvrir son clown au contact de l’eau, de l’herbe, du métal des clôtures. Jeu de mime proposé afin de prendre conscience que je n’étais pas seul. Et sa chaleur brisait toute la glace de l’hiver. Pour moi.
Je me rappelle aussi du kiosque à musique ou il n’y avait pas de musique. Mais un conteur. Un vieux conteur qui nous racontait des histoires et puis disparaissait. Un joueur de flûte d’Hamelin qui aurait laissé les enfants à leurs parents. En guise de gratitude. De n’avoir pas reproduit. D’avoir brisé le cercle de l’absence, de la crainte, de l’ennui. De ce froid.
Nous étions, mon père et moi, les princes d’un jardin
et nous jouions les rois.