Dans les wagons bondés du métro parisien on peut lire, ces jours-ci, quelques mots apaisants : ”La poésie est naturelle. Elle est l’eau de notre seconde soif.” Ils sont d’Andrée Chedid, poète à l’honneur de l’édition 2010 du Printemps des poètes. Une petite anthologie, parue pour l’occasion et préfacée par son petit-fils, le chanteur M, permet de renouer avec ce chant si clair.
Avec les mots de tous les jours, avec les sentiments communs, Chedid agence les temps. Les temps d’une vie, de ses joies, de ses douleurs aussi, par des mots voyageurs qui ont connu l’exil. Qui ont su préserver leur potentiel intact à force d’économie et de lente filtration. « La peine est de ce monde, je le sais bien » reconnait-elle, pour tout de suite ajouter « Mais chaque fleur d’orage porte la graine de demain ».
La poésie de Chedid, discrète et rare (essentiellement quatre livres chez Flammarion, un chez Gallimard) parle à notre part d’enfance. Elle lui ouvre des pistes pour se ré-enchanter. Pour que l’on garde intact nos émerveillements. « Vivre en poésie, ce n’est pas renoncer ; c’est se garder à la lisière de l’apparent et du réel, sachant qu’on ne pourra jamais réconcilier , ni circonscrire ». Une belle invitation à conjuguer ce réel avec nos rythmes intimes. En espérant rejoindre pour de douces mélodies tous ceux en face de nous. Une fraternité d’eau.
>> Andrée Chedid, Poèmes choisis, Ed. Librio, 100p, 3 euros.