à Michel Butel (1940-2018)
Fondateur de l’Autre journal
Il y a des choses
bien
créées, éditées, produites, vendues
par des mecs
pas bien
il y a l’inverse
des choses pas bien
faites
par des mecs bien
ou pire
des choses pas bien
faites
par des mecs pas bien
tu me fais remarquer
qu’il y a aussi
des mecs bien
qui font des choses pas bien
en pensant faire bien
moi
j’aimerai juste faire
des choses bien
avec des mecs bien
mais est-ce que ce que je fais
est-ce que ce que je suis
est bien ?
je ne sais pas bien.
Ça y est, après des années, je viens de terminer ma collection de l’Autre Journal. Tous les numéros. Des premiers mensuels sous-titrés « Les nouvelles littéraire » en en passant par les hebdos, les numéros monstres de 1991 aux derniers numéros de 1993, sans Butel. Les numéros de l’impossible aussi, et de l’Azur, et d’Encore (pas tous, si jamais certains en ont gardés…).
Avec Le Tigre, Le Fou parle, L’œil électrique et Moins!, ce sont les dernières collections de journaux que je vais garder (avec A suivre et Métal Hurlant, mais c’est de la BD). Des journaux créatifs, inventifs, fous et profonds, comme on n’en fait (presque) plus. Des journaux qui nous rendent fiers d’être humain. Michel Butel a été l’un de ces grands créateurs de presse, prenant le journal au cœur, comme j’essaye de prendre la poésie au cœur : pas un prétexte, mais le moyen et le but. En supprimant tout ce qui est superflu. Le numérique permet ça, désormais. Dès le mois prochain, je vais reprendre Gustave et faire la même chose que ce que Michel Butel a fait entre l’autre journal et l’azur. Revenir à un journal intime. Non pas pour me recroqueviller, mais pour offrir une respiration, un expir, à cette aventure collective. Pour éviter qu’elle ne s’essouffle, pour retrouver du plaisir pur de faire et d’offrir. Pour revenir, pour commencer, comme jamais, une poésie la vie entière.