quand il faut tout rassembler
autour de soi
le courage les vêtements le sourire
et qu’on n’est pas très sûre de vouloir sortir
dans le tranchant du jour
le corps perdu
le cœur perdu
marcher sur le fil d’un silence
guetter quelques mots de passage
prémices d’un éveil
échos d’une lampe allumée
à la fenêtre
de l’autre côté de la rue
les jours à pas comptés
Gaëlle Josse
Et recoudre le soleil, Ed. Notabilia, 96 p., 10 €
Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :
Entre deux romans, tels que les récents Une femme en contre-jour et Ce matin-là (Notabilia 2019 et 2021), Gaëlle Josse écrit des poèmes. Sur des tickets, des marque-pages, dans son téléphone, au fil des instants. « La poésie demeure pour moi comme une apparition, une attention portée à l’infime, comme le surgissement d’un éclat fugace au cœur de nos vies. L’éclosion d’invisibles soleils », écrit-elle en préambule de ce recueil de textes épars, souvent très courts, qui sont autant de photographies sans titre, sans lieux, sans personnages dénommés.
Ces mots sont déposés comme des petits cailloux blancs pour nous rappeler de revenir toujours à la mesure, malgré les vents contraires : « ces minuscules désarrois qui nous assaillent dans la clarté du jour/comment les nommer ? » Des poèmes minéraux, qui, tels des jardins japonais en miniature, procurent le cadre idéal d’une méditation à l’abri des tumultes de notre époque. « D’où vient cette envie de s’asseoir/de ne plus rien vouloir d’impossible//tout est bien peut-être/tracer encore quelques cercles puis//s’effacer. »
Stéphane Bataillon
(Initialement paru dans La Croix l’hebdo n°120 du 18/02/2022)