J’écoute mais je ne sais pas
Si ce que j’entends est le silence
Ou dieu
J’écoute sans savoir si j’entends
La sonorité des plaines du vide
Ou la conscience attentive
Qui des confins de l’univers
Me distingue et me fixe
Je sais juste que je chemine comme celui
Qui est regardé connu aimé
Et c’est pour cela que je mets en chaque geste
Du risque et de la solennité
Sophia de Mello Breyner Andresen
La nudité de la vie. Anthologie bilingue, traduit du portugais
par Michel Chandeigne. Éd Chandeigne, 192 p., 20 €
Écoutez ce poème (lecture Stéphane Bataillon) :
C’est une poésie d’épure, toujours en mouvement entre îles, mers et coraux, sous le soleil de la Méditerranée. Une poésie métaphysique mais ramenée aux mouvements des jours ordinaires. Comme pour les élever au niveau des gestes mythiques d’Orphée ou d’Eurydice, rappelés au fil des vers. Comme pour les rendre aussi intenses que l’amour d’Antoine et Cléopâtre : « Par tes mains j’ai mesuré le monde / Et sur la pure balance de tes épaules / J’ai pesé l’or du Soleil et la pâleur de la Lune. »
Sophia de Mello Breyner Andresen (1919-2004), est une poète portugaise catholique « au sens premier du terme ». Sa poésie, présentée dans cette anthologie en édition bilingue, est à la fois finement tracée, retenue et lumineuse. Elle dit, de la meilleure manière, comment vivre de l’intérieur sans s’enfermer : « Mais comment sans les amis / Sans le partage l’étreinte la communion / Respirer l’odeur d’algue des marées / Et cueillir l’étoile de mer dans ma main. »
Stéphane Bataillon
En partenariat avec l’émission « Poésie et ainsi de suite », de Manou Farine, chaque samedi à 17 h 30 sur France Culture. Disponible sur franceculture.fr et l’appli Radio France.
Retrouvez ce poème dans La Croix L’Hebdo n°130 du 29 avril 2022.