L’herbe écrasée et tiède
Orfèvrerie émeraude
Sous les arbres longeant la route,
nous nous asseyons
silencieux
Nos souffles appartiennent à d’autres
Et rien dans les environs ne murmure
plus
L’insecte transporte son monde
Tandis qu’aboli de la fleur
Le pollen parcourt son vol initiatique
La pierre est plus à sa place
Ici
Que nous ne le serons jamais
Nulle part
Et cette abrupte révélation
M’apporte un doux réconfort
Ludovic Villard
Il faut toujours se préparer à perdre, Le Castor Astral, 160 p., 9 €
Poète né en 1983 et rappeur sous le nom de scène de Lucio Bukowski, Ludovic Villard convoque dans Il faut toujours se préparer à perdre ses souvenirs d’enfance, en y mêlant fantaisie et faits divers inventés. Il s’interroge : « Je ne reconnais plus grand-chose / De cet endroit où j’ai grandi // Immeubles détruits / immeubles reconstruits (…) Où est cette part de nous dans ce perpétuel changement ? » Derrière l’oubli, la maladie, il tente par le poème de subvertir un univers urbain empli de petites misères en un terrain de jeu pour ce qui reste d’enfance. Faisant résonner ses rythmes « Transformant le terrain vague / En luxuriant jardin. », il nous invite à le suivre dans ses pérégrinations. Une seule chose est sûre : « Au moins le feu est entretenu ».
Stéphane Bataillon
(Initialement publié dans La Croix l(Hebdo #156)