(Notules initialement parues dans le cahier Livres & idées de La Croix du jeudi 4 mai 2023)
Toute la poésie (1970-2009)
de Martine Broda
Flammarion, 369 p., 25 €
« Rencontrer, c’est croire à la beauté/d’un être touché par la fatigue. » Voici, rassemblée, l’ensemble de l’œuvre poétique de Martine Broda (1947-2009). Une poésie qui tenta, à une époque où cela n’était plus à la mode, d’imposer un lyrisme porté au plus haut, à la frontière de l’absence et du domaine des anges. D’une solitude choisie et nourrie par la figure de sa mère revenue des camps et la perte de sa sœur, son poème s’adresse à un Autre retiré, laissant libre et possible le déploiement d’un rythme propre et d’une liberté. Dans sa belle et profonde préface, son amie Esther Tellermann note « Ta poésie brille de l’étoile, celle de la judéité désignée mais aussi celle de toute exclusion, toute solitude, toute folie que le poème transfigure » et rapporte sa définition d’un lyrisme qui « n’est que ce qui remplace le silence des Dieux ».
Poème pour les oiseaux
de Gary Snyder
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Marie-Christine Masset
Le Castor Astral, 152 p., 16 €
Ami de Jack Kerouac et d’Allen Ginsberg, prix Pulitzer de poésie en 1975, l’Américain Gary Snyder a marqué la Beat generation d’une poésie ancrée dans les mythes, le chamanisme et le zen. Influences diverses pour mieux louer la terre, militant par le langage et l’action pour défendre, et sublimer, le sauvage. Ce recueil majeur, publié en 1960 lorsqu’il avait 26 ans, est construit en trois parties liant l’homme et son sol, remontant aux gestes d’une écologie première : bûcheronnage, chasse, feux. Un long chant, envoûtant, pour retrouver le monde : « Je suis assis sans penser au bord du chemin en bois/Je fais éclore un nouveau mythe. »