Les marques pages poésie du mois de novembre, parus dans le cahier Livres&idées de La Croix du 4/11/2021
La poésie de la terre ne meurt jamais
de John Keats
Traduit de l’anglais par Thierry Gillybœuf (correspondance) et Cécile A. Holdban (poèmes)
Poesis, 128 p., 16 €
Pour célébrer le bicentenaire de la mort de l’immense poète britannique John Keats (1795-1821), cet ouvrage rassemble – sous une préface éclairante de Frédéric Brun retraçant son parcours créatif – vingt poèmes, une riche chronologie, un large choix de sa correspondance et les notes biographiques des destinataires rendant le poète vivant au travers de ses relations. Un bon moyen d’entrer dans l’œuvre de cet auteur disparu à l’âge de 26 ans, pour qui la poésie, art sublime, se situait à l’interstice du bien et du mal, du beau et du laid. « Je suis vraiment perplexe dans un monde de doutes et d’illusions ; il n’y a rien de stable dans le monde ; le tumulte, écrit-il, est votre seule musique. »
Quelques pas hors de l’éternité
de Roland Reutenauer
photographies de Philippe Lekeuche
L’herbe qui tremble, 96 p., 16 €
Retenir les instants en les capturant sur la page et, en retour, oser délivrer ces mots qui n’arrivaient pas à sortir, briser le silence, les secrets enfouis, cocher « les paysages que tu voudrais emporter », sauvé par le poème d’une mémoire défaillante. « Certains mots s’éloignent/je peine à les ramener », écrit Roland Reutenauer dans ce nouveau recueil. Des poèmes pour vivre le temps qui passe, ornés des photographies oniriques de Philippe Leukeuche, qui conjurent « l’absence et le néant » par une contemplation transformée en parole. « un dimanche silencieux / soleil d’octobre /sur la veste campagne // un dimanche de Moyen Âge / aucune trace de présent ».
de Rachel
Traduit de l’hébreu et présenté par Bernard Grasset
Enracinée dans la Bible, la poésie de Rachel (1890-1931) a marqué la poésie hébraïque moderne en seulement trois recueils, Regain (1927), De loin (1930) et Nébo, sorti après sa mort, en 1932, et tous parus en français chez Arfuyen. Ce volume inédit, rassemblant poèmes épars présentés en version bilingue, articles, lettres et appareil critique parachève l’édition de ses œuvres. Une poésie ou l’espace et le temps se confondent dans les figures de Noé ou de Jacob qu’elle nous rend familière dans des vers qui nous sont adressés en plein cœur, avec pureté et douceur : « Au soir, comme s’embrasent/Des étincelles sur la montagne/ Une étincelle s’élève de moi / Vers des cimes sans retour. »
Stéphane Bataillon