Il n’y a plus rien
les avions ne volent plus
les voitures et les bruits
se sont désemparés
Il n’y a plus rien
plus personne pour nous dire
que voir et que paraître
au travers des vitres
Il n’y a plus rien
pour empêcher cette herbe
de fendre le bitume
quand le ciel s’autorise
à redevenir bleu
Plus rien
que les oiseaux.
——-
« Ici, il n’y a plus rien. Que les oiseaux. »
Passante interrogée sur LCI le 18/03/2020.
Un commentaire
Cher Monsieur, bonjour et merci pour vos poèmes,
en lisant votre poème « ici il n’y a plus rien, que les oiseaux, je m’aperçois que j’ai moi aussi écris le même jour un poème qui ressemble beaucoup au votre. Normal me direz-vous nous vivons la même chose. C’est tout de même toujours touchant lorsque l’on se rend compte de ces synchronicité.
Je suis heureux de partager à mon tour avec vous ce que j’ai écris ce jour-là. Cela s’appelle » Cela faisait longtemps … »
Cela faisait longtemps …
Cela faisait longtemps que je voulais,
Et un jour les grands trains se sont arrêtés,
Et j’ai enfin pris le temps pour le faire,
Je les ai fabriqués sous le soleil,
J’y ai mis de la passion,
Et j’y ai mis du soin,
Et les oiseaux se sont mis à nicher,
Cela faisait longtemps que je voulais,
Et les moteurs des voitures se sont tus,
En me promenant dans la grande rue,
Où avais-je la tête, je ne sais plus,
Entendre la plainte des oiseaux de passage,
Mon cœur à mi-chemin entre le ciel et moi,
Perché sur une branche il se manifeste,
Cela faisait longtemps que je voulais,
Et les avions n’ont plus décollé,
J’ai ramassé le grand saut vide qui s’était envolé,
Au pied du vieux pommier,
C’était un jour de grand vent,
Je l’ai cherché longtemps,
Et tous les vols ont été annulés,
Cela faisait longtemps que je voulais,
Et les lettres ne sont plus arrivées,
Et j’ai enfin pris tout mon temps,
J’ai trié mes papiers poussiéreux,
J’en ai jeté beaucoup au feu,
À quoi bon conserver le passé,
Boîte aux lettres vide de mes pensées,
Cela faisait longtemps que je voulais,
Et j’entends les battements de mon cœur,
Sur la table, pas de tarte aux fraises,
Je n’avais pas le cœur à le fêter,
Tant de morts le jour de mon anniversaire,
Nous n’avons jamais été autant réuni,
Et nous n’avons jamais été aussi loin,
Cela faisait si longtemps que je voulais,
Et les rires aussi, ont fini par se taire,
Et au bout de quelques jours, l’enfer,
Je n’avais plus rien à faire,
Même les animaux n’y comprenaient plus rien,
Dans les rues vides devenues fleuve,
Les pigeons se sont envolés en rivière,
Cela faisait si longtemps que je voulais,
Et la morsure de l’angoisse est venu de très haut,
Et les maisons ont été bien tenues,
Mais dans le ciel, plus de traces,
Juste un bleu silencieux traversant les carreaux,
Quand reverrai-je nos enfants ?
Et les larmes ont fini par coulé,
Cela faisait si longtemps que je voulais,
Maintenant nous avons tout le temps,
Et notre cerisier a chanté ses fleurs,
Et ensemble, nous l’avons partagé,
Et doucement nous avons changé,
Peut m’importe combien il nous faudra de temps,
Une fleur s’ouvre à chaque instant.
V.Prudhomme le 20/04/20
« Cela faisait longtemps »… par Vincent Prud’homme
Poème du 4/05 (CJ23) à partager sur : https://www.vincentprudhomme.com/blog/53-cela-faisait-longtemps